Après avoir lu deux des titres de la rentrée littéraire Flammarion, le premier sur les femmes, le rapport au corps et la naissance et le second sur le handicap et notamment le couple au sein du handicap, cette fois-ci, j'ai lu un gros pavé, déjà sorti en anglais, et déjà présent dans notre librairie, avec le premier titre de Elif Shafak que je lis. Le résumé avait l'air fortement intéressant, un roman type épopée, se déroulant à trois périodes, dans trois endroits différents.
Première époque Londres en 1840, où on suit Arthur, un garçon né dans une famille miséreuse sur les bords de la Tamise. Ensuite en 2014 Naryn, yézidie encore enfant, parlant turc et kurd, dont le peuple est menacé. Élevée par sa grand-mère, suite à la mort de sa mère et à l'absence répétée de son père, très occupée à droite et à gauche, l'enfant vit avec des convictions fortes, sa Grandma étant elle-même une sourcière. Quant à Zaleekhah, elle est hydrologue, et habite sur une péniche sur le fameux fleuve londonien, en 2018.
On suit chacun de ces personnages durant les plus de 450 pages du récit, nous amenant dans une épopée, à travers les siècles et les lieux. Au tout début du roman, on découvre la cité toute puissante de Ninive, dominée par le roi Assurbanipal un homme impitoyable, prêt à tuer tous ses ennemis qui menaceraient sa cité. Il vit dans un immense palais, dont la bibliothèque est très riche, et dont il est très fier. Il aime notamment lire "L'épopée de Gilgamesh", le plus vieux poème du monde recensé jusque lors.
Tout part de ce poème, et de cette cité anciennement riche et prospère, au large du Tigre, le berceau de l'humanité.
Arthur au XIXeme siècle à Londres, bien que né dans une famille très pauvre, est doté d'une très grande mémoire, et vouera une obsession aux livres, aux écrits, et notamment au déchiffrage de l'écriture cunéiforme dont il découvrira les tablettes au British Museum, lieu qui deviendra son repaire. Il travaillera sang et eau tout d'abord chez un éditeur où il apprendra beaucoup, avant de faire ses preuves au fameux musée londonien, où il passe seulement 14 minutes par jour, durant sa pause repas du midi attirant la curiosité du personnel. À l'époque, Londres n'était pas ce qu'elle était actuellement, une ville sale, où les classes sociales riches et pauvres étaient largement séparées, et où la Tamise, fameux fleuve londonien n'était qu'un déchet à ciel ouvert, entraînant maladies et épidémies.
Tout finit dans le fleuve qui tue les londoniens
Ou plutôt "les londoniens assassinent l'eau".
Naryn, neuf ans, va pour se faire baptiser au début du roman, au bord du Tigre, dans son village, avant d'être arrêtée par un homme devant détruire ledit village, appartenant aux "adorateurs du diable" le peuple yézidie, ne faisant pas partie des trois grandes religions monothéistes, l'islam, la chrétienté et le judaïsme, étant vus comme impis, ne parlant meme pas L'arabe mais le turc et le kurde. Une époque charnière au moment où les extrêmes prennent le pouvoir au Moyen-Orient, voulant éliminer toute personne allant à l'encontre de leurs convictions religieuses avec l'élévation de Daech. Grandma la grand-mère dotée d'un don, celui de pouvoir trouver n'importe quelle source, souhaite amener sa petite fille jusqu'en Irak, pour terminer ce qu'elle avait commencé, à savoir son baptême. À Ninive plus exactement, la fameuse ancienne cité glorieuse. Mais l'entreprise s'avérera bien plus difficile que prévu.
La grandma de Naryn dont le chiffre préféré est le 7. 7 péchés capitaux, 7 portes conduisant a l'enfer, 7 jours/semaine, 7 sages qui arpentent la terre, 7 régions corps humain.
Fait tout en fonction de ce chiffre
Zaleekhah quant à elle, viens de dépasser les 30 ans, met son couple en stand-by, en décidant d'aller s'installer sur une péniche sur la Tamise. Élevée par son oncle et sa tante, elle est hydrologue, spécialisée donc dans l'étude de l'eau et sa mémoire.
"Les femmes sont censées se comporter comme des rivières. Se réadapter, prendre une nouvelle forme"
Un jour alors qu'elle se rend une énième fois dans la magnifique et grande villa de ceux qui l'ont élevée, elle découvre sur le bureau de son oncle, "L'épopée de Gilgamesh", la ramenant à ses origines. Son oncle très inclus dans la société britannique, étant un immigré fier de sa réussite, s'étant fait seul, et faisant même partie de la chambre des Lords, ne parle jamais de ses origines, mariée lui-même a une Britannique pure souche. Grâce à ce livre, il ramène Zaleekhah à ses origines, et à ses traumatismes.
Chaque personnage, chaque destinée à un rapport étroit avec Ninive l'ancienne cité mystique, la ressource fondamentale qu'est l'eau et Constantinople en tant que berceau de l'humanité.
Un roman type Epopee, ensorcelant et tellement prenant, que j'ai lu en un peu de deux jours. Un récit foisonnant et palpitant nous amenant à découvrir d'anciennes civilisations perdues dont la memoire est toujours là grâce à des artefacts importants. La Tamise et Le Tigre étant deux personnages, majeurs et à part entière dans le récit. Les racines et l'identité étant deux sujets predominants du récit avec trois récits distincts qui se croisent. Superbe.
"Les fleuves du ciel" de Elif Shafak, 24€

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